Notre position vis-à-vis des préconisations de l'ADEME sur la publicité

L'avis que l'ADEME vient de publier sur la publicité apporte un regard utile au débat public. Il inclut une série de préconisations dont certaines semblent avoir privilégié le pragmatisme sur l'ambition, mais dont plusieurs nous paraissent effectivement nécessaire et/ou s'inscrire dans la bonne direction.

Quelques semaines après la publication de l'important rapport interministériel sur les enjeux de régulation de la publicité (lien externe), l'agence de l'environnement - l' ADEME ou " l'Agence" ci-dessous - publie à son tour sa position sur le sujet, à travers un "avis".

Retrouvez ici notre décryptage plus technique (lien externe) du contenu de cet avis.

Communication et démocratie considère que l'avis de l' ADEME, un organe particulièrement actif sur les questions de publicité et de communication responsable, apporte un regard complémentaire utile dans le débat public.

Et nous soulignons que l'exercice de priorisation des enjeux qu'a réalisé l'Agence présente le premier intérêt majeur du document, puisqu'elle cible avec une grande clarté les problématiques qui nous paraissent également centrales sur le sujet :

  • celles des volumes importants de publicité pour des produits polluants,
  • et celle des limites des mécanismes actuels de lutte contre le greenwashing et l'incitation au gaspillage.

L'avis inclut une série de préconisations vis-à-vis desquelles vous retrouverez ci-dessous notre analyse politique.

Des mesures de transparence nécessaires

Les mesures de transparence en faveur d'un logo environnemental sur un maximum de produits, qui serait rendu obligatoire sur les publicités, ainsi que la publication des dépenses publicitaires annuelles des 100 plus grands annonceurs et sur les produits sensibles nous paraissent nécessaires, comme un premier pas vers le renforcement des politiques de régulation.

Contrats climats et taxe « pollueurs-payeurs » : un dispositif ambiguë

Les préconisations relatives d'une part, à l'insertion du dispositif des contrats climats dans le droit dur, et d'autre part, à la taxe « pollueurs-payeurs » pour financer des campagnes de sensibilisation dans 5 secteurs sensibles pour l'environnement doivent être analysées ensemble.

Communication et démocratie considère qu'un certain nombre de produits devraient être interdits de publicité en raison de leur caractère particulièrement néfaste pour l'environnement (ou la santé publique) et que, par ailleurs, une taxe sur les dépenses des grands annonceurs (pour les produits autorisés à la publicité...) est nécessaire pour lutter contre les phénomènes de surconsommation ; ajoutons qu'une telle taxe permettrait au passage de dégager des ressources significatives, pouvant potentiellement soutenir à la fois la communication d'intérêt général et aussi, possiblement, l'indépendance des médias.

De ce fait, lorsqu'un produit est considéré comme suffisamment polluants pour être interdit de publicité - comme par exemple selon de nombreuses organisations de la société civile, les véhicules lourds ou les voyages en avion à haute intensité carbone -il nous paraîtrait contre productif de remplacer leur interdiction de publicité par un mécanisme de simple réduction de la publicité, quand bien même cela contribuerait à financer des campagnes de sensibilisation pour des alternatives à ce produit.

Articuler interdictions, (nouveaux) contrats climats et taxe sur les grands annonceurs ?

En revanche, certains des produits ciblés par l'ADEME posent moins de difficultés en raison de l'empreinte carbone liée à leur production ou leur usage, qu'en raison de leur renouvellement prématurée : l'obsolescence marketing. Il s'agit alors plutôt de produits « sensibles » que de produits « néfastes », c'est par exemple le cas d'un certain nombre de produits d'électroménager.

Dans ce contexte, la nouvelle approche des « contrat climat » pourrait être intéressante pour réduire la publicité pour ces produits sensibles, et la question de l'organe en charge du contrôle de conformité des contrat climats pris par chaque entreprise devrait alors être posée.

En tous les cas, la logique de « pollueur payeur » ne nous paraît pas pertinente, y compris pour les produits sensibles inclus dans les contrats climats. En effet, une taxe sur les grands annonceurs sur l'ensemble du marché publicitaire nous parait avant tout nécessaire dans un objectif de réduction globale de la pression commerciale, et celle-ci pourrait contribuer de manière plus importante qu'une taxe pollueur-payeur au financement de la communication d'intérêt général.

Régulation des contenus : s’en tenir au renforcement des pouvoirs publics

Concernant la préconisation pour renforcer la régulation des contenus, nous rejoignons le diagnostic des limites des pouvoirs dont dispose la DGCCRF à ce jour et l'appel à les renforcer (ainsi que leurs moyens humains), notamment afin que la DGCCRF puisse imposer plus facilement des sanctions dissuasives aux donneur d'ordre des campagnes trompeuses.

En revanche, concernant la nouvelle répartition des rôles entre les pouvoirs publics et l'ARPP, nous regarderons avec intérêt la position de l' ARPP face à l'ouverture qui lui est faite, mais notre conviction est que la régulation des contenus doit être entièrement assurée par un organe indépendant de l'industrie, qui prenne en charge le contrôle a priori. Nous rejoignons néanmoins l'approche pragmatique consistant à cibler le contrôle a priori systématique sur les campagnes de grande envergure.

Nous accueillons favorablement la volonté de l' ADEME d'aborder la question de l'incitation publicitaire à la surconsommation et soutenons son appel à revoir l'article L-541-15-9 du Code de l'environnement, y compris à aborder sur le plan juridique la notion de « surconsommation ».

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