L’Observatoire citoyen de la publicité est lancé !

Nous y avons beaucoup travaillé avec des nombreuses organisations alliées et aujourd'hui, nous y sommes : l'Observatoire citoyen de la publicité est lancé ! Les citoyennes et citoyens vont désormais pouvoir signaler les publicités problématiques, et nous, organisations actives dans divers domaine d'expertise, les analyser.

L'objectif : faire évoluer les termes du débat sur la régulation des contenus publicitaires.

C'est à la fin de l'année 2023 que Communication et démocratie a mis l'idée sur la table pour la première fois, et amorcé les discussions avec une série d'associations avec lesquelles nous avions souvent travaillé sur ces sujets : et si nous créions un outil qui permette aux citoyens d'assurer une veille sur les publicités qui posent problème, afin que nous, acteurs de la société civile, puissions ensuite nous en saisir pour documenter les nombreuses campagnes publicitaires qui nous paraissent véhiculer des discours problématiques ?

On sait que 4 personnes sur 5 considèrent que la publicité pousse à la surconsommation. L'idée d'un observatoire citoyen a tout de suite paru intéressante, son utilité évidente. Il restait alors à en faire une réalité. Aujourd'hui, nous y sommes, avec 7 associations fondatrices1, engagées en faveur de la transformation de l'économie, de l'écologie politique, de la lutte contre l'impunité des multinationales et de la régulation de la publicité, et 13 organisations partenaires2, incluant des associations de consommation et des influenceurs spécialisés. La société civile a répondu présente, parce qu'un tel observatoire est indispensable. Désormais, il est prêt et il démarre.

D'où vient-il, comment a t-il pris forme ? On vous raconte.

1.  Associations membres fondatrices : Communication et démocratie, Halte à l'Obsolescence Programmée, Institut Veblen, Les Amis de la Terre - France,  Résistance à l'Agression Publicitaire, Sherpa, Zéro Waste

2.  Organisations partenaires de l'OCP : Alerte Greenwashing, Alternatiba, Association Addictions France, La Confédération Syndicale des Familles, Eclaircies, Observatoire des Multinationales, Paye Ton Influence, Pépites Sexistes, Perles de  greenwashing, Quota Climat, Reclaim Finance, Réseau Action Climat

Pourquoi un observatoire des contenus publicitaires aujourd’hui ?

Les enjeux de régulation de la publicité ne cessent de monter en puissance depuis quelques années, en particulier depuis la loi Climat et résilience adoptée en 2021. Ces enjeux sont désormais nombreux : produits sur lesquels la publicité doit être autorisée, encadrement des supports de diffusion, réduction de la pression commerciale, régulation des contenus... Mais le débat politique sur la question spécifique de la régulation des contenus remonte à bien plus longtemps.

Dès le Grenelle de l'environnement en 2007, la question du greenwashing était au centre de débats. Celle de l'incitation publicitaire au gaspillage a ensuite émergé durant les débats autour de loi Economie circulaire (« loi AGEC ») adoptée en 2020. Puis, les multiples questions de régulation des contenus publicitaires dans une perspective écologique étaient encore l'objet d'intenses débats l'année suivante durant la loi Climat et résilience.

Sur la question de la régulation des contenus publicitaires, le diagnostic de la société civile est assez clair depuis plusieurs années : le dispositif actuel de régulation des contenus est manifestement insuffisant car nous observons encore trop de discours problématiques diffusés à grande échelle. Pour discuter plus en détails de quel dispositif serait approprié, des rôles que pourraient- ou ne devraient pas - avoir les différents acteurs sur cette question- DGCCRF, Ministère de l'environnement, ARCOM, ARPP, etc. - encore faudrait-il que les décideurs politiques entendent d'abord ce diagnostic... Les débats durant la loi Climat et résilience ont montré que ce n'était manifestement pas le cas, que nos décideurs avaient encore besoin d'un petit coup de pouce pour véritablement se saisir des enjeux. De là a émergé l'idée d'un observatoire : un outil qui permette de réaliser une veille permanente sur les campagnes publicitaires en cours, et de documenter celles qui paraissent véhiculer des discours problématiques.

Nous étions conscients que de nombreuses personnes et organisations réalisaient déjà un travail de veille et d'analyse des discours publicitaires, mais leurs analyses restaient disséminées dans la nature, voire perdues dans les fils historiques de quelques réseaux sociaux. L'idée d'un observatoire dédié devait permettre de centraliser ces initiatives dans le temps et dans l'espace, de créer un véritable centre des ressources qui permette à toutes les personnes intéressées de retrouver les campagnes problématiques passées et présentes, et accompagnées d'analyses rigoureuses.

Pourquoi un observatoire citoyen ?

Identifier et analyser une campagne problématique peut être positionné comme un débat réservé aux experts. Mais on pourrait considérer que les acteurs les mieux placés pour indiquer quelles sont les campagnes qui posent problème sont en fait les citoyennes et les citoyens qui y sont exposées. Le public a également l'avantage de la force du nombre pour réaliser, collectivement, une veille d'envergure sur les dizaines de milliers de campagnes diffusées chaque année dans l'espace public. Nos associations ayant de l'expertise mais aussi des forces limitées, nous avons considéré qu'il était à la fois pertinent et efficace de confier le travail de veille sur les campagnes problématiques au public, pour concentrer notre énergie sur l'analyse des campagnes qui nous auront été signalées. L'histoire des luttes transformatrices montre que la coopération entre le public et un collectif d'organisations de la société civile est souvent une bonne idée...

Nous assumons une troisième raison à la dimension citoyenne de cet observatoire : oui, nous voulons mobiliser le public, faire grossir les rangs des gens qui considèrent qu'il est temps de renforcer la régulation de la publicité, montrer aux décideurs politiques qu'il est temps d'entendre le diagnostic critique que nous portons sur la régulation des discours publicitaires. Un observatoire citoyen permet au public de s'impliquer et en cela, il constitue un outil de campagne. Faire campagne semble désormais nécessaire pour faire évoluer le rapport de force, alors nous nous sommes donné les moyens.

Déterminer le périmètre de l’OCP : un processus passionnant

Sur son site internet, l'OCP permet à chaque citoyen de signaler, par un formulaire simple, une publicité qu'il considère abusive. Mais abusive dans quel sens ? Nous en avons abondamment discuté avec les 6 autres associations fondatrices de l' OCP.

L'importance de pouvoir signaler le greenwashing n'a pas fait débat, elle est au centre des problématiques de discours, et la condamnation il y a seulement quelques jours du géant Total Energies pour pratiques commerciales trompeuses est là pour nous le rappeler1.

Nous sommes rapidement tombés d'accord aussi sur le fait que le blanchiment d'image, ce n'est pas uniquement un enjeu écologique, car trop d'entreprises diffusent aussi des discours trompeurs sur leurs pratiques vis-à-vis des travailleurs et des populations affectées par leurs activités de production, le plus souvent dans des pays à la main d'œuvre bon marché. Deux des associations fondatrices de l' OCP, Shera et les Amis de la Terre, pointent régulièrement ces enjeux, et Sherpa en particulier travaille abondamment sur ces questions. Les signalements pour tromperie incluront donc aussi les problématiques de socialwashing.

Nous avons également voulu nous attaquer à une question peut-être plus difficile à appréhender, mais pas moins centrale dans la communication commerciale : les incitations publicitaires à la surconsommation. Mais comment différencier une incitation à la surconsommation d'un simple discours commercial ? C'est justement ce que nous comptons préciser dans le cadre du travail de l'OCP.

Notre association Communication et démocratie a abondamment travaillé sur la question de la « surconsommation », notamment dans le rapport que nous avons publié en 2022 avec l'Institut Veblen (également membre fondateur de l' OCP)2. L'association Halte à l'Obsolescence Programmée, membre fondateur de l' OCP, a publié en mars 2025 un rapport sur l'obsolescence marketing - le fait de renouveler prématurément un produit encore fonctionnel - qui place au centre le rôle des discours publicitaires3. ZéroWaste France, autre membre fondateur de l' OCP, pourra également mettre à profit son expertise relative à l'accumulation des déchets pour mieux comprendre la fonction de certains discours publicitaires dans les comportements de gaspillage. Nous avons les armes pour qualifier les discours incitant à la surconsommation, et beaucoup d'appétit pour le faire.

Mais allions-nous produire un outil permettant à toutes les citoyennes et tous les citoyens de signaler des publicités qui leur paraissent problématiques tout en nous limitant au seul terrain de la transformation écologique et sociale sur lequel nous étions particulièrement légitimes ? Cela aurait été dommage, et Résistance à l'agression publicitaire (RAP), autre membre fondateur de l'OCP a fait une proposition forte : clairement, sur les enjeux publicitaires, les questions de stéréotypes dégradants sont importantes, et nous devrions mettre à profit l'OCP pour avancer aussi sur cette question. RAP a déjà travaillé activement sur la question du « publisexisme »4 et l'association Pépite Sexiste, une référence sur ces sujets, a rapidement exprimé son engouement pour le projet. Nous avons alors adopté une approche ouverte à l'ensemble des stéréotypes dégradants, car la question concerne aussi les minorités visibles, les handicapés et d'autres populations qui peuvent être vulnérables.

Finalement, l'OCP sera donc aussi un « bien commun », un outil au service d'une variété de luttes et d'une variété d'organisations de la société civile actives dans différents domaines d'expertise. Nous sommes sans doute allés dans le bon sens puisque de nombreuses organisations - 13 à ce jour - n'ont pas tardé à confirmer leur intérêt de devenir partenaires du projet. Il est difficile d'entrer plus en détail sur les précieuses forces que chacune apporte à la Coalition, mais vous pouvez retrouver plus d'informations sur chacune d'ente elles sur le site de l' OCP.

Construire l’OCP, un sacré chantier !

Fin 2024, la coalition des membres fondateurs était consolidée, le projet et le modèle économique5 étaient bien ficelés sur le papier, il restait alors seulement... à construire les outils opérationnels ! Cela aura été l'aventure principale de l'année 2024 pour Communication et démocratie qui, en lien avec les 6 autres membres fondateurs, est au front sur ce projet ; en particulier sa petite équipe salariée et notamment Jeanne Wetzels, chargée de mission OCP au sein de l'association.

Le nom - l'Observatoire citoyen de la publicité - s'est imposé de lui-même assez facilement et le graphiste Bernat Font (lien externe) a nourri - avec brio selon nous, mais sommes-nous objectifs ? - le volet visuel de cette identité, logo et charte graphique. Sur le plan éditorial, nous avons également été accompagné par Charles André (lien externe), qui nous a permis de mieux calibrer nos messages et on l'espère, être en phase avec les publics les plus susceptibles de s'impliquer en déposant des signalements.

Il a alors fallu construire l'outil central de l'observatoire : le site internet, avec son formulaire permettant de signaler les publicités, et des espaces permettant de retrouver facilement tous les signalements, y compris ceux qui ont été analysés, regroupés dans un espace dédié. Pour cela, CODE a eu le plaisir de travailler (à nouveau...) avec la coopérative Noesya (lien externe), qui a construit un outil ad hoc, spécialement forgé pour le fonctionnement de l'OCP. Un outil libre et open source, puisque c'est autant une marque de fabrique de Noesya qu'un choix fort de la part des membres de l'OCP. Un outil également exemplaire sur le plan énergétique puisqu'au test de l'Ecoindex, le site de l'OCP obtient un score B. L'habillage du site - le webdesign des pages - a été logiquement été travaillé par l'auteur de l'identité visuelle, Bernat Font. Nous remercions chaleureusement Bernat Font, Charles André et l'équipe de Noesya pour la qualité de leur travail.

Notre souhait, pour l'avenir de l' OCP, serait d'améliorer encore ce site, le rendre plus résistant aux éventuelles menaces, plus pédagogique et ergonomique aussi pour le public, mais nous attendrons pour cela d'avoir cheminé un peu...

Pour l'instant : priorité aux premiers pas de l' Observatoire citoyen de la publicité !

5.  Nous tenons à remercier nos partenaires financiers sur ce projet : la fondation Terre Solidaire, le fonds Equitée Partagée de Max Havelaar et la fondation Charles Léopold Mayer.

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