La Commission européenne propose d’étendre les pratiques commerciales trompeuses

La proposition déposée le 30 mars 2022 inclut notamment une nouvelle définition de l'allégation environnementale et renforce l'information environnementale.

L'objectif du texte est de garantir la clarté et la transparence des informations environnementales des produits achetés par les consommateurs, notamment en renforçant le cadre législatif sanctionnant l'écoblanchiment.

La proposition porte sur trois axes principaux :

  • La garantie de la fiabilité de l'information du public quant à l'impact environnemental des produits achetés ;
  • La clarté de l'information du public quant aux modalités d'application de la garantie de durabilité et de réparabilité des produits achetés ;
  • La clarté de l'information du public quant aux modalités d'application de la garantie de durabilité et de réparabilité des produits achetés ;
  • L'information du consommateur sur les garanties de fourniture des mises à jour logicielles par les fournisseurs.

Ces objectifs sont déjà visés par un certain nombre de normes en vigueur que le projet de directive se propose de préciser et de compléter.

En effet, la proposition du directive du parlement du conseil prévoit de modifier « les directives 2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d'agir en faveur de la transition écologique grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et à de meilleures informations ».

Le nouveau dispositif des pratiques commerciales trompeuses

La première directive modifiée, la directive 2005/29/CE, fixe le régime applicable aux pratiques commerciales déloyales des entreprises pour protéger les consommateurs au sein de l'Union européenne.

En droit français, les dispositions de cette directive ont été transposées aux articles L. 121-1 et suivants du code de la consommation. Les informations fausses ou de nature à induire en erreur sur les qualités substantielles des produits, ou l'omission d'une information de la même nature sont déjà qualifiées de pratiques commerciales trompeuses prohibées.

Depuis l'adoption de la loi Climat et résilience le 22 août 2021, des allégations, indications ou présentations fausses de nature à induire en erreur le consommateur sur « l'impact environnemental » du produit ou sur « la portée des engagements de l'annonceur en matière environnementale » sont susceptibles de caractériser une pratique commerciale trompeuse (article L. 121-2 du code de la consommation). Bien que certaines allégations environnementales aient été spécifiquement interdites par d'autres dispositions, ces notions ne sont toujours pas clairement définies. Elles n'ont pas non plus fait l'objet d'une jurisprudence suffisamment abondante pour en éclairer la portée et le potentiel.

La transposition de la proposition de directive pourra donc être l'occasion de préciser le champ d'application de ces dispositions du code de la consommation.

En effet, le projet de texte publié par la commission prévoit une liste de définitions nécessaires à la mise en œuvre des dispositions envisagées. Parmi ces définitions, celles de l'allégation environnementale, explicite et générique, du label de durabilité, du système de certification, de l'outil d'information sur la durabilité, de la garantie commerciale de durabilité, de l'indice de réparabilité,... fourniront des éléments nouveaux.

La nouvelle définition de l'allégation environnementale

L'allégation environnementale y est définie comme « tout message ou toute déclaration non obligatoire en vertu du droit de l'Union ou du droit national, notamment du texte, une image, une représentation graphique ou un symbole, sous quelque forme que ce soit, y compris un label, une marque, une dénomination sociale ou une dénomination de produit, dans le cadre d'une communication commerciale, qui affirme ou suggère qu'un produit ou un professionnel a une incidence positive ou nulle sur l'environnement, est moins préjudiciable pour l'environnement que d'autres produits ou professionnels, ou a amélioré son incidence environnementale au fil du temps; ».

Sans nul doute, la formulation de la définition témoigne de la volonté de la commission européenne de couvrir un large panel d'actions et de méthodes de communication des professionnels. Cet élargissement souhaitable pourrait également éclairer des contentieux en cours devant les juridictions, à l'image de l'action introduite le 2 mars 2022 par Greenpeace, Notre Affaire à Tous et Les Amis de la Terre France devant le Tribunal judiciaire de Paris pour demander la condamnation de Total Énergies pour pratiques commerciales trompeuses.

Par ailleurs, le texte ajoute aux informations communiquées susceptibles de constituer une pratique commerciale trompeuse, lorsque celles-ci sont fausses ou ont pour but d'induire le consommateur en erreur :

  • L'incidence environnementale du produit
  • Sa durabilité
  • Sa réparabilité

Le fait d'émettre une « allégation environnementale relative aux performances environnementales futures sans engagements ni objectifs clairs, objectifs vérifiables et sans système de contrôle indépendant » ainsi que d'effectuer « la publicité d'avantages pour les consommateurs qui sont considérés comme une pratique courante sur le marché concerné » caractérise également des pratiques réputées trompeuses.

Enfin, seront considérées comme substantielles les informations du « professionnel [qui]fournit un service qui compare des produits, y compris au moyen d'un outil d'information sur la durabilité, les informations sur la méthode de comparaison, sur les produits faisant l'objet de la comparaison et sur les fournisseurs de ces produits, ainsi que sur les mesures mises en place pour tenir ces informations à jour ». Leur omission pourra donc également être considérée comme une pratique trompeuse.

Si une formule large, telle que celle qui est consacrée en droit positif français, laisse une marge de manœuvre plus importante aux juges que des textes précis, l'expérience passée nous montre que ces derniers ne s'en sont ou n'en ont été que trop peu saisis.

Les précisions ainsi apportées par le projet de directive devraient donc permettre d'encourager les juges à aller dans le sens d'une condamnation plus régulière des pratiques d'écoblanchiment et d'harmoniser l'encadrement de la communication des entreprises dans tous les états membres.

Des nouveaux droits pour les consommateurs

La deuxième directive modifiée est la directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs. En droit français, les dispositions de la directive 2011/83/UE ont été transposées aux articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation.

L'article L.111-1 du code de la consommation prévoit que doit notamment être communiquée, en amont du contrat à titre onéreux entre un professionnel et un commerçant, l'information relative à « L'existence et les modalités de mise en œuvre des garanties légales, notamment la garantie légale de conformité et la garantie légale des vices cachés, et des éventuelles garanties commerciales, ainsi que, le cas échéant, du service après-vente et les informations afférentes aux autres conditions contractuelles »

Ces dispositions sont générales. L'information qui doit être communiquée au consommateur n'est pas toujours précisée. La transposition de la directive, si elle est adoptée, permettrait de clarifier les informations exactes communiquées aux consommateurs concernant les garanties des biens vendus.

L'objet de la proposition de directive est de modifier les informations précontractuelles fournies aux consommateurs dans les contrats qu'ils concluent avec les professionnels.

Que le contrat soit à distance ou non, le professionnel doit fournir des informations détaillées concernant :

  • l'existence d'une garantie commerciale de durabilité et la durée de cette garantie, si celle-ci s'applique à l'ensemble du bien pendant plus de deux années ;
  • Pour les biens consommateurs d'énergie, à défaut, l'information selon laquelle le professionnel ne fournit pas d'informations concernant l'existence d'une garantie commerciale de durée de plus de deux ans ;
  • Pour les biens comportant des éléments numériques, l'existence d'une garantie de durabilité ainsi que sa durée, si celle-ci dure plus de deux ans et s'applique à l'ensemble du produit, et la durée minimale pendant laquelle le producteur fournit des mises à jour logicielles, sauf exception prévue par le contrat ;
  • Pour les contenus et services numériques dont le fournisseur est différent du professionnel, la durée minimale pendant laquelle le fournisseur fournit les mises à jour logicielles, sauf exception prévue par le contrat.

Du développement normatif au renforcement institutionnel ?

De nombreuses inconnues demeurent sur l'adoption future de ce texte.

Néanmoins, il présente d'ores et déjà l'intérêt d'annoncer une politique relativement ambitieuse de l'Union européenne en matière d'écoblanchiment et d'inviter les juges français à caractériser mais aussi sanctionner avec plus de rigueur les pratiques commerciales trompeuses fondées sur un argument environnemental qui inondent les espaces de communication.

Pour assurer une application vertueuse du texte, cette action devrait s'accompagner d'un contrôle accru des autorités administratives sur le respect des nouvelles exigences posées, question que le projet de directive n'aborde pas directement, laissant le soin à chaque État membre de mettre en œuvre les moyens nécessaires. En effet, le renforcement des obligations imposées aux professionnels pourrait rester en partie lettre morte s'il ne s'accompagne pas d'une augmentation des moyens financiers et humains mis en œuvre pour en garantir le respect, sauf à laisser - là encore - aux opérateurs privés et à la société civile le soin d'assurer cette surveillance dans un combat à armes inégales.

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