De nombreux enjeux de politiques publiques reposent sur la connaissance scientifique, comme dans le cas des produits chimiques. Dans ce contexte, s'est développée une science singulière, en lien direct avec ces politiques publiques, dite « science réglementaire » (regulatory science). Lorsque des produits à risque se trouvent au cœur du modèle économique de grandes entreprises, celles-ci vont investir dans des activités visant à fausser l'évaluation scientifique par les pouvoirs publics, afin de maintenir leurs produits sur le marché.
Certains parlent d' "agnotologie" comme étude de la construction de l'ignorance, d'autres de « science-washing » comme activité de détournement de la science.
Le science-washing démarre nécessairement par la production d'une science propre aux entreprises. Cela peut passer par la multiplication les financements de recherches dont les termes de référence seront bien calibrés sur les intérêts du privés, pour laisser agir ensuite le « biais de financement ». Lorsque nécessaire, l'interprétation des résultats bruts de ces recherches reposera sur des méthodologies significativement éloignées des standards du secteur académique, tout en satisfaisant aux critères des « bonnes pratiques de laboratoire » (BPL), le passeport pour nourrir la science réglementaire.
Pour produire cette science et la diffuser de manière crédible, l'entreprise, par le bras de l'industrie des relations publiques, organise des évènements scientifiques (panel d'experts, colloque, etc.) facilitant le mélange de genre. Elle développe ainsi son propre réseau de chercheurs et professeurs, les plus conciliants d'un point de vue idéologique et plutôt ouverts à des commandes d'articles généreusement rétribués. Certains vont également servir de prête-nom pour multiplier la parution d'articles, écrits en sous-main par les conseillers de l'entreprise (ghostwriting), des « synthèses » souvent éditoriales qui visent principalement la contestation de la solidité des résultats accumulés par la recherche indépendante. La publication de ces articles va aussi nécessiter l'infiltration des organes dirigeants des revues scientifiques, pour influencer les résultats des processus de revue par les pairs, lorsqu'il ne s'agira pas de créer de toute pièce des maisons d'édition et revues scientifiques.